dimanche 20 décembre 2009

Cassandre est morte idiote


Qui se souvient de cette phrase.J'écoutais hier un Cassandre épuisé : un des rares scientifiques (Paul Jorion de l'Université libre de Bruxelles je crois) à avoir dit que le système financier allait dans le mur en klaxonnant et que bien sûr, autour de la table de ses amis et de ses pairs, nul ne disait le croire. Il expliquait que compter la richesse en additionnant les biens, les créances et les créances douteuses était une drôle d'idée bien éloignée du bon sens paysan.
Cassandre (du grec "celle qui embrouille les hommes") était une princesse troyenne qui voyait l'avenir mais que personne ne croyait jamais. De quoi rendre fou non?
Le monde de la finance, le monde industriel, le monde scientifique, le monde politique a ouvert la chasse aux Cassandres dans les années 90. C'est que c'est ennuyeux, lorsque l'on joue le grand jeu des gains à court terme d'écouter une autre musique qui dirait "attention!".
Ces gens sont plein d'espoir. Ils comptent sur leur chance, sur le fait que le marché leur soit propice, que les trois essais positifs de leur dernier produit technologique soient représentatifs, que les quelques mesures médiatiques prises suffisent à éteindre l'agitation dans les banlieues. Sont-ils optimistes? Non, car eux même n'y croient pas.
L'orateur expliquaient que ses collègues à table comprenaient ses arguments et n'y opposaient pas de contre-analyse. Personne n'est bien surpris des derniers déboires technologiques, que les batteries explosent, que les avions s'écrasent, que les phtalates nous clarifient le sperme et nous rendent inféconds.
Pendant ce temps là, Cassandre a le choix. Celui de se taire et de se cacher. Celui de hurler à devenir folle.
Car Cassandre n'a pas de solution. Elle ne peut que s'allier à quelqu'homme de raison et de bons sens pour essayer de faire taire les irrationnels qui, comme on dit dans nos campagnes, comptent les oeufs dans le cul des poules.