mardi 10 novembre 2009

Génie de l'hindouisme

L'hindouisme présente de sympathiques caractéristiques dans ce sens et la façon historique utilisée par les anciens indiens pour neutraliser les tendances destructives de la religion est assez intelligente.
  • On ne devient pas hindou : il n’est pas possible de se convertir et il n’y a pas de prosélytisme
  • Le clergé est muselé : Les brahmanes sont là pour dire comment mener les cérémonies. C’est une prestation commerciale. La validité du sacrifice est acquise même sans eux. Dans l’Inde du Sud, dravidienne, ils sont même plutôt mal vus.
  • La philosophie religieuse a deux étages :

    • La « vraie » religion de l’Inde : basée sur les védas (les dieux védiques ont des correspondances exactes avec les dieux celtes comme l’a démontré T.Lüghinbul de l’université de Genève) : elle n’est connue que de quelques pourcents de la population
    • La religion « populaire » que tout le monde connait, basée sur deux poèmes épiques : Le Mahabaratha et le Ramayana


Dans le Mahabaratha se trouve la bhagavad-gita dont je vous parlerai un peu plus loin et qui explique largement le dégout de l’Inde pour le sport et la compétition… Au 6ème siècle avant JC, le Bouddha apparaît. L’hindouisme n’existe pas. Seules les trois castes supérieures (prêtres, guerriers et marchands) ont accès à l’enseignement des védas. Bouddha appartient à la caste des guerriers. Cette caste n’a jamais pu « sentir » la caste des prêtres, les brahmanes. Au travers l’histoire rêvée et réelle, ils se sont toujours affrontés pour le leadership. Le sixième avatar de Vishnou est même venu les exterminer sur 21 générations parce qu’ils n’étaient pas gentils avec les brahmanes. La cible commerciale de Bouddha c’est les intouchables et les hors castes (notez l’analogie avec St Paul qui se charge des gentils et laisse les juifs à St Pierre). En effet, ceux-ci n’ont pas accès au védisme (c’est même une faute de leur en parler). Bouddha leur propose de le rejoindre dans une philosophie du rejet de l’action pour éviter la douleur. Un très grand succès. Cinquante ans auparavant, les 24 saints hommes fondateurs du jaïnisme n’avait eu qu’un succès d’estime tant ils étaient extrêmes et dénudés (Le Jaïnisme existe encore en Inde mais est très marginal). Quelques siècles plus tard, 80% de la population indienne est Bouddhiste. L’hindouisme moderne est peut-être la contre mesure. Au 1er siècle, un groupe (sans doute) de sage écrit le Mahabaratha (officiellement ils dictent le texte à Ganesh le dieu éléphant). Je voudrais vous parler d’un morceau de celui-ci, connu sous le nom de Bhagava Gita… Je résume. Vishnu est un dieu de centre droit qui intervient quand le conservatisme est menacé par une innovation (et là….avec Bouddha, ça va plutôt mal). Le huitième avatar de Vishnu est Krishna, un prince menteur et ambigu, qui se déplace avec une cour de jeunes femmes. Comme souvent, une succession royale se passe mal, deux groupes s’affrontent pour le pouvoir et les armées se font face, à la méthode antique. Aux deux chefs, Krishna a proposé de choisir entre soit toutes ses armées et son matériel militaire, soit lui tout seul, et qui en outre, ne participera pas au combat ! Arjuna choisi Krishna, laissant l’avantage militaire à son challenger. Donc, le Bhagavad gita commence par l’arrivée d’Arjuna dans le no mans land entre les deux armées avec Krishna comme conducteur de char. Il doit sonner de sa conque pour lancer la guerre. Mais il s’effondre. Il voit des cousins, des amis des deux côtés. Le monde n’ayant pas de sens. A quoi bon .. Autant se laisser mourir. Le sujet du Bhagavad gita est « pourquoi, bien que Arjuna ait découvert le pot-aux-roses : Le monde n’a pas de sens, il faut quand même agir et ne pas se complaire dans la contemplation bouddhique ».. En 92 pages, Krishna va faire le grand écart pour convaincre le guerrier d’agir. Quelques temps plus tard, au VIIIème siècle, un Sâdhu proposa que Bouddha soit considéré comme la neuvième réincarnation de Vishnu. La chronologie y laissa des plumes mais tout le monde redevint hindou et le bouddhisme a disparu d’Inde. C’est un honneur douteux. En effet, Vishnu se serait incarné en Bouddha pour donner des fausses informations aux vilains hors caste et les perdre, rétablissant ainsi l’ordre. En Europe, nous avons résolu le problème de l’élitisme des religions pré chrétiennes par l’importation d’un dérivé de judaïsme arrangé par Paul dans un grand souffle épique à sens unique menant de la genèse à l’apocalypse. Je trouve que la solution indienne au problème de besoin de sens dans la population humaine est plutôt finement menée, tout en préservant le cœur du système de pensée, les védas, qui ne parle absolument pas des dieux de l’hindouisme actuel. Avant St Paul, c’est la plus remarquable manipulation des foules pour éviter qu’elles ne se massacrent par désespoir que je connaisse. Il est illusoire de penser que le rationnel est universel. Il est minoritaire et le restera. La fonction sociale de la philosophie, si elle existe, est bien de proposer d’une part une réflexion de qualité et, tout en restant honnête, une mystique pour aider les irrationnels à vivre et à maîtriser leur peur. C’est de la politique et de la précaution. Faute de quoi, le rationnel devra un jour expliquer non pas la causalité, mais l’addition 1+1=2, à un tribunal de docte religieux prêt à le brûler. Le souci de notre société occidentale est d’avoir de grandes difficultés, après avoir brillamment gagné sur l’irrationnel, à proposer une mythologie laïque à ceux qui ne pourront jamais supporter l’absence de réponse à leurs pourquois.